Chers élèves,
L ’apprentissage du Yoga passe par une compréhension profonde du souffle. Aujourd’hui, nous portons notre attention sur Ujjayi, la respiration victorieuse.
Cette technique, souvent utilisée dans les postures (āsanas) et la méditation, permet de stabiliser le mental, d’allonger le souffle et de canaliser l’énergie vitale (prāṇa).
En cultivant la conscience du souffle Ujjayi, nous apprenons à relier mouvement, respiration et présence intérieure — une base essentielle de toute pratique yogique.

Ujjayi
La respiration victorieuse
« Chaque fois que le mental s’échappe, qu’il soit doucement ramené vers le Soi. »
Glotte et cordes vocales
Le larynx se prolonge par la trachée, un conduit d’environ 12 centimètres de long, constitué d’anneaux cartilagineux serrés. Sa paroi interne est tapissée d’une muqueuse ciliée et de glandes à mucus.
Ces éléments assurent une protection essentielle contre les particules et les corps étrangers, en les piégeant puis en les évacuant vers l’extérieur grâce au mouvement des cils vibratiles.

Etymologie
La traduction du terme ujjayi est délicate et varie selon les auteurs. Le préfixe ud signifie « ce qui se dirige vers le haut, ce qui s’élève, s’épanouit ». Il porte une idée de puissance et d’élévation. Le terme jayi — dérivé de jaya — évoque la victoire, le succès, mais aussi la maîtrise, la retenue, le contrôle.
Ainsi, ujjayi peut se comprendre comme « celui qui s’élève victorieusement ». Il s’agit d’un souffle à la fois conquérant et maîtrisé, dans lequel la poitrine se déploie avec ampleur — « comme celle d’un guerrier ». Ce souffle victorieux symbolise la domination consciente du pratiquant sur le flux respiratoire, permettant de réguler la quantité d’air, son débit et son rythme.
Ujjayi est également connue en Occident comme la respiration chuchotée ou la respiration du dormeur, en référence au léger son de « ronflement » produit par le resserrement doux de la glotte — un son dont l’intensité peut être modulée pour devenir plus ou moins audible selon l’effet recherché.
Prise du contrôle glottique
Plusieurs astuces peuvent aider à comprendre et à pratiquer ujjayi, car il est rare d’obtenir un bon résultat dès les premières tentatives.
- Alignement du cou
Commencez par rapprocher doucement le menton du cou afin d’allonger la nuque et d’aligner les cervicales. - Mise en place du contrôle glottique
Contractez légèrement les muscles du cou pour réduire partiellement l’ouverture de la glotte, puis inspirez lentement par le nez en maintenant cette contraction.
L’air, freiné par ce passage rétréci, produit un bruissement caractéristique, doux, feutré, presque chuchoté. - Exercice de soupir
Pour affiner la sensation, soupirez fortement par la bouche en émettant un “hah…” venu du fond de la gorge, comme un souffle vibrant et détendu. - Variation “Hamsa”
Inspirez en chuchotant mentalement la syllabe “Ham”, puis expirez en chuchotant “sa”, en plaçant le son dans la glotte.
Au fil de la pratique, “sa” se transforme naturellement en un “sor” plus profond et résonnant. - Exécuter sans bruit le simulacre d’un raclement de gorge. Observer attentivement l’endroit où se manifeste la vibration de l’air expulsé. Puis, bouche fermée, reproduire le même son.
Apparaît alors au fond de la gorge, une sensation de fraîcheur à l’inspiration et de tiédeur à l’expiration.
Aucune contraction ni frémissement ne doit apparaître sur le visage : il suffit que le « chuchotement » soit perceptible pour l’exécutant.
On a alors la sensation que le nez n'est qu'un vestibule, la véritable entrée de l'air se faisant par le portillon de la glotte.
Ujjayi n’est pas un effort : c’est une écoute.
Quand le souffle devient son, le son devient prière,
et la glotte devient le seuil du silence.

Rôle d’Ujjayi dans les āsanas
L’inspiration en Ujjayi provoque un écartement latéral du thorax – un phénomène physiologique naturel – qui facilite grandement le déroulement de la posture.
La qualité respiratoire s’affine progressivement : la durée des cycles s’allonge, leur régularité s’installe, et le ressenti tangible du souffle permet un meilleur contrôle et une conscience accrue de la respiration.
Cette attention portée au flot du souffle favorise la concentration et une pleine présence à soi tout au long de la pratique. Dans la pratique des āsanas, Ujjayi devient le gardien du souffle (prāṇasya rakṣakaḥ), celui qui relie le mouvement du corps à la lumière de la conscience :
Yato yato niścarati manaś cañcalam asthiram
Tatas tato niyamyaitad ātmanyeva vaśaṃ nayet
— Bhagavad Gītā VI.26
Ujjayi aide également à respecter ses limites, en évitant toute tension ou effort excessif.
Observations :
- Plus le son du souffle devient subtil et discret, plus la respiration se fait longue, fluide et agréable.
- Ujjayi ne se limite pas à la pratique du yoga.
En cas de lassitude, de déprime, de fatigue, de nervosité ou de tension, il est bénéfique de pratiquer Ujjayi avec un rythme lent, régulier et équilibré, en portant son attention sur la source du son, au creux de la gorge.
La vibration du souffle y crée, à la base du crâne — au niveau du bulbe rachidien — un subtil micro-massage que l’on perçoit de mieux en mieux avec l’expérience. On peut d’ailleurs y concentrer son attention pour en amplifier les effets.
Cette vibration-massage exerce une action profondément apaisante et régulatrice sur l’ensemble du système nerveux.
Hatha Yoga Pradipika énonce (2/53) :
" ujjayi peut être pratiqué dans les mouvements debout, assis ou en marchant. Il élimine les désordres des nadi et des dhatu".
Je vous souhaite de conquérir votre liberté respiratoire en maîtrisant Ujjayi, le souffle victorieux qui dompte le mental !

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